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07.10.2020 |News

Des salaires plus élevés pour un travail «immoral»

Une étude menée par l’Université de Zurich (UZH) examine le lien entre moralité et salaire. Elle démontre que dans le domaine public, les activités considérées comme «immorales», telles qu’un emploi dans l’industrie du tabac ou les fabriques d’armes, sont mieux payées.

Un comportement immoral sur le lieu de travail peut entraîner de graves conséquences sociales. Par exemple, dans le passé, des cas de complicité de fraude fiscale ont provoqué des scandales dans la branche financière et des multinationales du tabac ont été accusées d’user de méthodes publicitaires frauduleuses, ce qui a porté atteinte à la confiance dans ces secteurs ou entraîné d’importantes charges pour les pouvoirs publics.

Une étude du département d’économie de l’Université de Zurich évalue les corrélations entre un travail considéré comme «immoral» et les primes salariales qui s’y rapportent. Elle s’intéresse par ailleurs au profil des personnes qui occupent ces emplois.

Travailler dans une multinationale du tabac est mieux rémunéré

Les économistes comportementaux démontrent qu’il est fréquent que les entreprises dont l’activité est perçue comme «immorale» offrent des salaires plus élevés pour un emploi comparable dans une entreprise considérée comme «morale». Cette prime salariale est élevée et ne diminue pas en fonction de l’expérience du marché de l’employé.

L’étude a interrogé des étudiantes et étudiants de l’EPFZ et de l’Université de Zurich en leur demandant de classer des emplois dans différents secteurs sur une échelle allant de «très immoral» à «très moral». Les activités jugées comme répondant à des normes éthiques peu élevées relèvent par exemple du domaine des jeux de hasard, de l’intermédiation financière, de l’octroi de crédits et de la fabrication ou du commerce en gros de produits du tabac ainsi que de la fabrication d’armes et de munitions. Les données salariales proviennent de l’Office fédéral de la statistique (OFS).

Les emplois immoraux attirent des personnes immorales

Dans une expérience en laboratoire, les participantes et participants ont en outre été répartis en deux groupes de personnes «morales» et «immorales» en fonction de leur disposition à travailler pour certaines entreprises. Résultat: les personnes qui accordent moins d’importance à une conduite morale ou qui n’ont pas de normes éthiques très élevées se tournent plutôt vers des entreprises «immorales» et gagnent un salaire plus élevé. Pour les auteurs de l’étude, cela s’explique par le fait que la majorité de la population adopte une conduite morale – aussi pour des raisons d’image – et qu’il y a par conséquent moins de personnes qui postulent dans une entreprise «immorale». Ses dirigeants essaient alors d’attirer des employés en leur offrant des avantages financiers. Or, cette pratique peut se révéler problématique. Elle risque en effet d’ancrer encore davantage des comportements considérés comme immoraux au sein de l’entreprise et d’avoir ainsi un effet négatif pour la société dans son ensemble, même si l’entreprise en question est considérée à tort comme étant amorale.

Importantes répercussions sociales

L’étude revient par ailleurs sur les conséquences politiques et sociales de ses conclusions. Les entreprises qui présentent la plus grande menace de préjudices sociaux (une multinationale du tabac par exemple) attirent en effet des employés qui accordent moins d’importance à la conduite morale. Cela réduit la probabilité que dans les secteurs immoraux, les entreprises ne prennent pas en compte les préjudices sociaux potentiels dans leurs décisions.

Lien vers l’étude

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