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17.05.2022 |News

Déchets sauvages

Les mégots de cigarettes sont les objets les plus souvent jetés sur notre planète – 4,5 billions finissent par terre chaque année –, dont plus de 6 milliards rien qu’en Suisse. Les filtres en plastique se retrouvent ainsi dans notre environnement, ne se décomposent que lentement, libérant des produits chimiques toxiques, un danger pour les hommes et les animaux. Depuis des décennies, l’industrie du tabac commercialise ses filtres inutiles en prétendant qu’ils rendent le tabagisme moins nocif pour la santé. Ce sont les principaux responsables de l’énorme problème des déchets sauvages.

Ils jonchent les trottoirs, le sol des forêts, le sable ou flottent dans les eaux : ce sont les mégots de cigarettes. Jetés négligemment, c’est le type de déchets sauvages le mieux accepté. 75% des fumeurs et des fumeuses déclarent avoir déjà jeté leur mégot par terre ou hors de leur voiture. Selon des études, 65 % des mégots sont « éliminés » de cette manière.[1] En Suisse aussi, des milliards de mégots finissent par terre.

Les filtres de cigarettes : un déchet plastique toxique

Le problème : les mégots de cigarettes, ou plutôt les filtres, sont en grande partie composés d’acétate de cellulose, un plastique difficilement dégradable – ils comptent donc parmi les déchets plastiques – et contiennent toute une série de substances toxiques (arsenic, nicotine, métaux lourds, etc.).[2] Une partie des substances nocives provient du tabac ou de sa transformation, une autre partie est produite par la combustion du tabac. Il faut parfois plus de dix ans pour qu’un mégot se décompose à l’air libre. Des substances toxiques sont alors libérées et polluent la nature. Avec la pluie, les substances toxiques des mégots de cigarettes s’infiltrent dans les sols, les lacs et les rivières, mettant en danger les organismes qui y vivent. Une concentration d’un mégot de cigarette par litre d’eau peut entraîner la mort de 50 % des poissons qui y vivent.[3] On estime qu’un seul mégot pollue au moins 40 litres d’eau.

Le plastique en lui-même pose également problème. En effet, les jeunes enfants, les animaux marins et les oiseaux risquent d’avaler les microplastiques. Un seul filtre est composé de plus de 15 000 fibres de plastique. C’est l’une des principales causes de la présence de microplastiques dans les océans.[4] Une étude a révélé la présence de résidus de filtres de cigarettes chez 70 % des oiseaux marins et 30 % des tortues de mer étudiés.[5] Les enfants en bas âge risquent d’être intoxiqués s’ils avalent les mégots qu’ils trouvent sur les aires de jeux.

Mégots de cigarettes jetés dans le sable (photo: Brian Yurasits, Unsplash)

Histoire d’une supercherie historique

Après l’apparition des filtres dans les années 1860 pour empêcher les morceaux de tabac d’entrer dans la bouche, l’industrie du tabac a introduit dans les années 1950 des filtres à cigarettes modernes en acétate de cellulose pour répondre aux préoccupations concernant le cancer du poumon lié au tabagisme.[6] Les filtres ont toujours été présentés comme une innovation majeure et un moyen de réduire les risques pour la santé. D’après des mesures effectuées par des machines, les perforations des filtres introduites dans les années 1970 et 1980 pour la fabrication des cigarettes « mild » et « light » ont permis de réduire les teneurs en goudron et en nicotine. Cependant, comme les trous du filtre sont recouverts par les doigts du fumeur, les dommages causés à la santé ont tendance à augmenter, car les fumeurs tirent plus souvent et plus profondément pour assouvir leur envie de nicotine. La grande majorité des études indépendantes montrent que les filtres ne réduisent pas les dommages liés au tabagisme, bien au contraire.[7]

 

Le ramassage et l’élimination des mégots jetés par terre représentent une charge énorme pour les communes et les villes. Les coûts de nettoyage élevés pèsent sur les pouvoirs publics. Les efforts de l’industrie du tabac pour s’attaquer au problème consistent uniquement à commercialiser ses produits dans le cadre de campagnes hypocrites d’écoblanchiment et à attirer l’attention du public sur ses produits grâce à des pseudo-solutions telles que le filtre en papier. En plus d’être nocifs pour l’environnement, les filtres sont inutiles. Leur seul objectif est de faire croire aux fumeurs que les risques pour la santé sont moindres et de maintenir ainsi les consommateurs dans la dépendance. La seule solution efficace serait d’interdire totalement l’utilisation des filtres.[8]

Cigarettes électroniques jetables

D’autres produits à base de tabac et de nicotine produits et commercialisés par l’industrie du tabac, comme les Puff Bars, sont également éliminés de manière inappropriée. Les Puff Bars sont des cigarettes électroniques jetables, disponibles dans différentes saveurs. Elles sont bon marché, faciles à se procurer et de plus en plus populaires auprès des jeunes.

Cigarettes électroniques jetables comme les Puff Bars: un cauchemar écologique (photo: TobaccoFree Ca)

Le marketing et la publicité pour les produits Puff Bar mettent l’accent sur leur capacité à être éliminés, bien que les instructions d’élimination soient minimales et que cette élimination soit souvent inappropriée. Les cigarettes électroniques jetables et à usage unique telles que les Puff Bars soulèvent d’importantes préoccupations environnementales: Comme leur nom l’indique, elles ne sont utilisées qu’une seule fois et sont ensuite jetées avec leur boîtier en plastique et leurs piles au lithium, au cobalt et au nickel. En plus des piles et des plastiques, les Puff Bars contiennent généralement des têtes de vaporisateur métalliques et des produits chimiques nocifs. Des métaux lourds comme le plomb, mais aussi la nicotine, peuvent s’échapper et constituer un danger biologique. Un coup d’œil sur les matières premières les plus importantes pour la fabrication des Puff Bars montre que la production a un impact dévastateur sur les écosystèmes et les communautés : les matières premières nécessaires sont obtenues au moyen d’une extraction non durable.

Vidéo sur le sujet

National Geographic: https://www.nationalgeographic.com/environment/article/cigarettes-story-of-plastic

Journée mondiale sans tabac du 31. mai «Le tabac : une menace pour notre environnement» Le tabac n’a pas seulement des effets négatifs sur la santé, mais chaque étape de sa chaîne de production met également notre environnement en danger. De la culture à la distribution, en passant par la production et l’élimination de déchets parfois toxiques, le tabac et l’industrie du tabac mettent en danger notre planète. La production de tabac nécessite à elle seule 22 billions de litres d’eau par an, principalement pour sa culture. De plus, des milliers d’hectares de terres sont déboisés chaque année pour la culture et le séchage. Quant à la production de cigarettes, elle génère chaque année 84 millions d’équivalents CO2 dans le monde. Vers le site de campagne


[1] Truth Initiative 2018.

[2] Evans-Reeves et al. 2021.

[3] Slaughter et al. 2011.

[4] Shen et al. 2021.

[5] Lunge Zürich 2021.

[6] Harris 2011.

[7] Evans-Reeves et al. 2021.

[8] van Schalkwyk et al. 2019.

Bibliographie

Evans-Reeves, Karen; Lauber, Kathrin; Hiscock, Rosemary (2021): The ‘filter fraud’ persists: the tobacco industry is still using filters to suggest lower health risks while destroying the environment. In: Tob Control, tobaccocontrol-2020-056245. DOI: 10.1136/tobaccocontrol-2020-056245.

Harris, Bradford (2011): The intractable cigarette ‘filter problem’. In: Tobacco control 20 (Suppl 1), i10. DOI: 10.1136/tc.2010.040113.

Lunge Zürich (Hg.) (2021): Zigarettenstummel - kleine Umweltsünder, grosser Schaden. Disponible en ligne sur https://www.lunge-zuerich.ch/userfiles/file/07_Shop/Merkblaetter/Merkblatt_Zigarettenstummel_kleine%20Umwelts%C3%BCnder%2C%20grosser%20Schaden.pdf, dernière consultation le 16.04.2022.

Shen, Maocai; Li, Yougong; Song, Biao; Zhou, Chenyun; Gong, Jilai; Zeng, Guangming (2021): Smoked cigarette butts: Unignorable source for environmental microplastic fibers. In: The Science of the total environment 791, p. 148384. DOI: 10.1016/j.scitotenv.2021.148384.

Slaughter, Elli; Gersberg, Richard M.; Watanabe, Kayo; Rudolph, John; Stransky, Chris; Novotny, Thomas E. (2011): Toxicity of cigarette butts, and their chemical components, to marine and freshwater fish. In: Tob Control 20 Suppl 1, i25-9. DOI: 10.1136/tc.2010.040170.

Truth Initiative (Hg.) (2018): Why are cigarette butts the most littered item on earth? Disponible en ligne sur https://truthinitiative.org/research-resources/harmful-effects-tobacco/why-are-cigarette-butts-most-littered-item-earth, dernière consultation le 16.04.2022.

van Schalkwyk, May C. I.; Novotny, Thomas E.; McKee, Martin (2019): No more butts. In: BMJ, l5890. DOI: 10.1136/bmj.l5890.

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