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19.08.2022 |News

Pochettes de nicotine: Traces de nitrosamines et taux importants de nicotine

Une étude allemande indépendante de 46 références de « pouches » (pochettes de nicotine) a relevé des taux importants de nicotine, des valeurs de pH favorisant son passage sanguin et des traces de nitrosamines spécifiques du tabac. Ces résultats divergent de ceux des fabricants et invitent à une meilleure régulation de ces produits.

Malgré leur forte ressemblance, par leur forme et mode d’usage, avec les snus (pochettes de tabac à insérer entre la gencive et la lèvre), les pouches ne contiennent pas de tabac, mais que de la nicotine, sous forme de free-base (nicotine extraite du tabac et purifiée), qui imprègne des fibres végétales. La nicotine contenue dans ces pochettes est absorbée par les muqueuses buccales.

En Suisse, la vente de snus a été interdite en 1995 pour des raisons de santé publique, comme dans le reste de l'Union européenne, où l'interdiction est toujours en vigueur. Cependant, après 1995, l'importation pour la consommation personnelle était légale et la consommation a augmenté petit à petit, notamment avec le développement du commerce en ligne. Dans un arrêt rendu en 2019, le tribunal fédéral a levé l'interdiction de vente en Suisse, arguant que l'ordonnance actuelle sur le tabac ne s'applique pas au snus.

Teneur en nicotine élevée

L’Institut fédéral allemand pour l’évaluation des risques a analysé 46 pouches commercialisées par vingt producteurs différents et achetées en ligne sur des sites européens ou extra-européens. Les teneurs en nicotine ont été estimées en mg/pouche et en mg/g de pouche. La recherche des nitrosamines spécifiques du tabac et la mesure du pH ont été assurées dans la mesure où les nitrosamines sont cancérigènes et où un pH élevé favorise l’absorption de la nicotine par les muqueuses buccales.

Les deux références se disant sans nicotine n’en contenaient effectivement pas. Parmi les 44 autres références, 38 utilisaient une simple description voire une échelle de notation arbitraire (de 1 à 4, sans mention de taux) pour indiquer la teneur en nicotine des produits. Dans 28 cas, soit plus de la moitié de l’échantillon, seule une mention descriptive indiquait cette teneur, sous des termes allant de « facile » et « medium », à « fort », « extra fort », « power », « ultra » ou « brutal ».

Les taux de nicotine variaient de 1,79 mg à 47,5 mg/pouche, avec un taux médian de 9,48 mg/pouche. Le taux maximal annoncé par un fabricant était de 11,9 mg/pouche. Ces taux sont nettement supérieurs à ceux observés aux Etats-Unis lors d’une précédente étude, avec un maximum de 6,73 mg/pouche.

Un pH élevé et une présence de nitrosamines

Les valeurs de pH mesurées se situaient entre 5,5 et 10,5, avec une valeur médiane de 8,8. Du fait que la nicotine a une acidité douce, l'absorption de la nicotine par la muqueuse buccale est considérablement facilitée par ces valeurs de pH plus élevées. Dans l'ensemble, les pochettes de nicotine sont conçues pour exercer un fort potentiel de dépendance.

La présence de nitrosamines spécifiques du tabac, dont certaines sont cancérigènes, a été observée sous forme de traces dans 26 des produits testés et quantifiables dans 17 d’entre eux, ce qui suggère un processus de purification de la nicotine free-base incomplet. De leur côté, les études financées par les fabricants n’ont encore jamais mentionné la présence de nitrosamines, leurs méthodes d’analyse étant moins fines.

Actions de régulation nécessaires

Les auteurs de l’étude prônent : (1) la limitation de la teneur en nicotine, (2) l’obligation d’indiquer clairement la quantité de nicotine présente dans chaque pouche, (3) le recours à une purification de la nicotine permettant d’éviter la présence, même très faible, de nitrosamines, (4) l’obligation d’apposer un avertissement sanitaire pour les femmes enceintes, et (5) l’assurance d’un contrôle efficace de l’âge légal d’achat. Parallèlement, l’ajout d’une grande variété d’arômes, l’utilisation d’emballages séduisants et la promotion de ces produits sur les réseaux sociaux devraient être encadrés afin de réduire leur attractivité auprès des jeunes. Enfin, des études cliniques devraient permettre de déterminer le potentiel addictif de ces produits et de valider s’ils peuvent être considérés comme des alternatives valables au tabagisme.

En Suisse, il n'existe aucune réglementation sur la publicité des pochettes de nicotine. Enfin, des études cliniques devraient déterminer le potentiel de dépendance de ces produits et valider s'ils peuvent être considérés comme des alternatives raisonnables au tabagisme.

Cet article est basé sur la contribution de nos collègues de Générations sans tabac


> Vers l’étude

Mallock N, Schulz T, Malke S, et al. Levels of nicotine and tobacco-specific nitrosamines in oral nicotine pouches. Tobacco Control Published Online First: 05 August 2022. doi: 10.1136/tc-2022-057280

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